Mercredi des Cendres

L’antienne de début Exaudi nos
Le répons chanté durant la distribution des cendres Emmendemus
L’introït de la messe Misereris omnium

Table des matières

A noter: il n’y pas de Gloria.

Commentaires des pièces de cette messe par Dom Baron.

Autrefois, le mercredi avant le premier Dimanche de Carême les pécheurs, qui, en raison de leurs fautes graves étaient soumis à la pénitence publique se réunissaient à l’Église. Le pontife bénissait les cilices qu’ils auraient à porter et leur imposait les cendres, symbole du repentir et de la mort qui tue la concupiscence ; puis, au chant des Psaumes de la pénitence, ils recevaient l’ordre de se retirer dans un monastère jusqu’au Jeudi Saint.

La cérémonie actuelle garde l’esprit de cette ancienne coutume ; les chants sont tous des appels à la miséricorde, pénétrés à la fois d’humble contrition et de l’énergie qui caractérise la résolution d’être meilleur.

I – La Bénédiction des Cendres –

Antienne Exáudi nos

LE TEXTE

Exauce-nous, Seigneur, puisque compatissante est ta bonté. Selon l’abondance de ta miséricorde, regarde-nous, Seigneur.

Ps.Sauve-moi, ô Dieu : car elles sont entrées, les eaux, jusque dans mon âme. Ps. LXVIII, 17, 2.

Le Psaume LXVIII n’est pas un des Psaumes de la pénitence, mais c’est un émouvant appel à la pitié divine. David fait plus que d’y exposer ses malheurs et de crier vers Dieu ; c’est l’histoire du Christ dans la Passion, l’histoire du Christ souffrant pour la rémission des péchés et appelant la miséricorde du Père sur ses membres repentants qu’il chante. Aussi bien, l’Eglise, qui continue le Christ, n’a-t-elle eu qu’à choisir quelques versets pour y trouver l’expression de sa misère criant vers la miséricordieuse bonté de celui qui détient le pardon.

LA MÉLODIE

Il y a un motif qui revient quatre fois ; sur quóniam benígna est (deux fois), sur misericórdia et sur secúndummultitúdinem ; un intervalle de tierce mineure ré-fa – qui se prolonge sur une tristropha. Il caractérise toute la première partie de l’antienne. Il en fait une sorte d’appel, comme un cri de détresse où se mêle de l’effroi ; le cri des âmes perdues dans l’abîme du péché qui supplient le Seigneur de les en retirer. Peu à peu, à l’idée de la miséricorde, la plainte diminue et se change en supplication. Dans la première incise, elle a complètement disparu ; il y a même un accent d’intimité sur réspice nos Dómine. L’amour a chassé la crainte.

Les tristrophas doivent être douces, comme toute la mélodie d’ailleurs.

II – La distribution des Cendres –

Antienne Immutémur

LE TEXTE

Changeons notre vêtement en cendre et en cilice :
Jeûnons et pleurons devant le Seigneur :
Car il est très miséricordieux et prêt à nous remettre nos péchés, notre Dieu.

Ces paroles ne sont pas dans l’Ecriture, mais les idées y sont familières, particulièrement en Joël II, 13.

Elles sont ici comme un réponse à la dernière oraison de la Bénédiction. L’Eglise y demandait pour les fidèles la grâce de faire pénitence sous la cendre et le cilice. Disposés à recevoir cette grâce, ceux-ci chantent la résolution qu’ils ont prise…Changeons notre vêtement…

LA MÉLODIE

On y trouve tous les sentiments qui se mêlent dans le repentir : Sur Immutémur hábitu, si ferme et si décidé, la résolution de changer de vie ; sur cínere, la contrition humble qui se voile et s’efface ; sur et cilício, le cri de douleur ; le repentir qui se lamente, dans le grave, sur plorémus et, brusquement, à l’aigu, sur ánte Dóminum. La troisième phrase chante plutôt la miséricorde, c’est une sorte de réflexion dans laquelle l’âme nourrit sa raison d’espérer ; les demi-cadences du IVe mode la pénètrent de confiance et déjà d’une nuance de paix.

Retenir légèrement la descente de quía dans la troisième phrase ; de même celle de nóstra.

Antienne Júxta vestibulum

LE TEXTE

Entre le vestibule et l’autel, se lamenteront les prêtres et les lévites du Seigneur, et ils diront :
Epargne, Seigneur, épargne ton Peuple :
Et ne ferme pas les bouches de ceux qui crient vers toi. Joël II, 17.

C’est l’ordre donné par Joël pour la pénitence qui réconciliera Dieu avec son peuple. L’Eglise s’en sert ici pour le même objet.

LA MÉLODIE

Dans la première partie, la mélodie se développe comme une plainte sombre, fort bien servie par les formules du IVe mode, notamment la tristropha de et et les cadences de altáre et de sacerdótes. Dans la seconde, elle est une nouvelle supplication sur óra clamántium et s’achève sur Dómine, qui reçoit, comme il convient, un large développement, dans une atmosphère d’humble contrition.

Bien appuyer le salicus de Párce Dómine, si expressif.

Antienne Emendémus

LE TEXTE

Réparons par une vie meilleure les péchés que, dans notre ignorance, nous avons commis :
De peur que soudain préoccupés le jour de la mort, nous cherchions le temps de la pénitence sans pouvoir le trouver.
Prête-nous attention, Seigneur, et aie pitié :
Parce que nous avons péché contre toi.

Verset.Aide-nous, Dieu notre salut : et pour l’honneur de ton nom, Seigneur, délivre-nous.

La première partie et le refrain s’inspirent de nombreux passages d’Esther et de Joël. Le verset est tiré du Psaume LXXVIII, VV. 7, 8, 9.

LA MÉLODIE

Toute la première partie est empreinte d’énergie. L’Eglise exhorte avec force ses membres à réaliser ce qu’ils ont décidé de faire. Notez l’élan du début, avec le salicus fortement posé sur emendémus et je ne sais quoi de vif sur in mélius, comme l’élan d’un départ. Une nuance de tristesse s’étend sur peccávimus, la tristesse lourde du péché. Dans la deuxième phrase, l’idée de la mort amène comme une touche de frayeur. La prière jaillit alors dans un bel accent de ferveur confiante sur Atténde Dómine ; puis, après s’être faite très humble et comme chargée de honte sur miserére, elle s’achève elle aussi, à l’évocation du péché, sur la même formule lourde de tristesse qui vient rimer, pour la troisième fois, avec peccávimus et possímus.

Dans le Verset, la supplication est plus osée, plus confiante, plus intime. C’est très remarquable dans l’élan du début et dans le mouvement plus dégagé qui se continue jusqu’à la fin. On notera l’insistance habile sur salutáris nóster, «toi qui es chargé de notre salut », et, après le própter nómen túum, traité en teneur de psaume, le très suppliant Dómine líbera nos préparant la reprise ardente de Atténde.

Faire l’accent de Atténde fort ainsi que celui de Dómine. Ne pas ralentir miserére.

III – La Messe –

INTROÏT

LE TEXTE

Tu as pitié de nous, Seigneur, et tu ne hais rien de ce que tu as fait,
Dissimulant les péchés des hommes à cause de la pénitence et leur pardonnant !
Parce que tu es le Seigneur notre Dieu.

Ps.Aie pitié de moi, ô Dieu, aie pitié de moi car, en toi, elle se confie, mon âme. Sagesse XI, 24, 27. Ps. LVI, 2.

Ces deux versets sont un hommage à la miséricorde divine qui ne cesse pas d’agir en dépit des ingratitudes des hommes. C’est dans ce sens général, que l’Eglise les entend ici. Toutefois, après la  réception des Cendres qui a valu tant de grâces de pardon à ses membres, elle y mêle tout naturellement sa reconnaissance ; sa confiance et sa supplication aussi, car elle sait bien qu’il y a encore à pardonner ; de sorte que cette affirmation très simple est en même temps hommage de foi, action de grâces, et prière.

LA MÉLODIE

L’âme parle au Seigneur dans l’intimité. Elle le fait avec une grande simplicité tout au long de la première phrase, enveloppant Dómine de tendresse et soulignant, par son insistance sur ómnium et sur níhil eórum, l’universalité de la miséricorde divine.

Dans la seconde, elle s’anime un peu. L’idée, si actuelle, du péché et de la pénitence semble faire la supplication dominer. C’est elle qui, sur la formule entendue trois fois déjà dans le Répons Emendémus, mais reprise ici à la quinte supérieure, monte ardente, mettant en plein relief devant le Seigneur própter pæniténtiam, le mot auquel la miséricorde ne résiste pas.

Après ce cri qui met en relief son mérite, l’âme revient à l’intimité paisible du début, s’attardant toutefois sur párcens íllis comme en une pression délicate ?  Puis, évoquant sur quía tu es Dóminus Déus nóster le choix que Dieu a fait de l’Eglise et les promesses qu’il lui a données, elle y met une fois de plus son amour reconnaissant, sa confiance et sa supplication. Celle-ci devient directe et ardente dans le Psaume… «Aie pitié de moi, Seigneur, aie pitié de moi… »

Le mouvement sera modéré, sans lenteur, et entretenu.

Prolonger la double note de eórum ; dans certains manuscrits c’est une bivirga épisématique.

La seconde phrase, a tempo. La première note des podatus de própter un peu allongée. Peu ou pas de ralenti à la fin de pæniténtiam. Retenir párcens íllis. Elargir le torculus de tu es.

Le Psaume, très humble et très priant.

GRADUEL

LE TEXTE

Aie pitié de moi, ô Dieu, aie pitié de moi :
Car, en toi, mon âme se confie.

Verset.Il a envoyé du ciel, et m’a délivré :
Il a livré à l’opprobre eux qui m’ont foulé aux pieds. Ps. LVI 2, 4.

Dans le premier verset, le psalmiste lance un appel à la miséricorde du Seigneur. Dans le second, il voit dans l’avenir son appel exaucé.

Le sens demeure le même dans le cadre liturgique de ce début de Carême. Le sous-diacre vient de lire à l’Epître le texte de Joël : « Le Seigneur a été touché  de zèle pour son pays et il a épargné son peuple et il a dit : Voici, je vous enverrai du blé, du vin, de l’huile… » L’âme, remise en confiance, en dépit de son péché, par ce qu’elle a entendu, se tourne vers Dieu. Elle lui demande d’avoir pitié d’elle, lui redit sa confiance et, dans un cri tout vibrant d’espoir, voit déjà le secours qui vient du ciel. Non pas du blé, du vin, de l’huile cette fois, mais le Christ, l’Envoyé, Celui qui changera le blé et le vin en son Corps et en son Sang et donnera à l’huile un pouvoir de salut, mettant ainsi sur nous la puissance libératrice de sa passion, de sa mort et de sa résurrection.

LA MÉLODIE

Miserére méi Déus miserére méi : quóniam in te confídit ánima méa.

La première phrase, qui se déroule toute entière dans le grave, est sombre. Elle ne manque pas d’ardeur, notamment sur méi, mais l’âme, couverte de confusion, n’ose pas lever les yeux sur celui qu’elle implore.

Dans la seconde, peu à peu elle domine sa honte et c’est une prière intense que, de toutes ses forces, elle lance vers Dieu. La mélodie monte de plus en plus insistante sur les rythmes ternaires de miserére, met un accent d’ardente supplication sur méi et va s’épanouir, toujours suppliante, sur le pressus qui commence la dernière incise, avant de redescendre doucement vers la tonique, humble encore, mais apaisée.

Les deux autres phrases ne sont plus un appel direct à la miséricorde. L’âme dit à Dieu sa confiance et s’en sert pour plaider sa cause. La mélodie est tout autre ; il n’y a plus de honte ni de supplication ardente, c’est la paix et presque la joie ; notez le motif de quóniam qui revient sur ánima et les rythmes qui s’allègent peu à peu. Le tout s’achève sur méa en une longue vocalise toute heureuse, qui se revêt à la fin, sur les trois punctums – qui sont trois virgas épisématiques – d’un dernier accent de confiance assurée et forte.

Verset.Mísit de caélo et liberávit me, dédit in oppróbrirum conculcántes me.

La mélodie, établie dès le début sur la dominante dans l’attitude de confiance où elle s’est mise ; elle la voit venir si précise et si nette dans la personne du Christ, dans son Esprit, dans sa grâce qui va lui appliquer de nouveau à Pâques le fruit de la Rédemption, que c’est déjà la joie de sa délivrance qu’elle chante. Notez le long développement de caélo en une sorte de contemplation heureuse, et la progression des pressus sur liberávit me avec l’ardeur qu’ils font s’épanouir sur la double note du sommet.

Le mouvement de la seconde phrase qui est léger au début, avec peut-être une nuance de revanche quelque peu hautaine, se fait plus retenu dans la suite, comme si l’âme s’indignait à la pensée de tout ce qu’elle a eu à supporter. Cet assombrissement passager disparaît dans la finale, qui est un bel élan de joie s’achevant dans la paix, avec le même accent de confiance sur les dernières notes.

Le mouvement ne doit pas être rapide, mais il ne faut pas traîner.

La double note de méi est une bivirga épisématique, la bien appuyer de tout le poids de la supplication ; Déus, ensuite, léger. Bien mener le mouvement du deuxième miserére en progression  jusqu’à la double note sur do. Très peu  de ralenti au torculus de la fin de la phrase.

Relier la troisième phrase à la seconde. Les podatus de in te un peu  retenus sur leur première note. Rattacher ánima à confídit. Prolonger et même répercuter délicatement la triple note de la fin qui est une trivirga épisématique, en l’appuyant bien ; l’expression en sera considérablement accrue.

Le verset, plus léger, joyeux même.

Le scandicus qui monte au do, sur caélo, retenu ; le reste du mot souple. La double note qui suit les pressus est bivirga épisématique, la pression exercée sur les pressus se continuera sur chacune des bivirgas. Même interprétation sur liberávit me.

Que le mouvement thétique de oppróbrium soit très lié, les ictus à peine touchés, intellectuels. Mener le mouvement en progression sur conculcántes. Exécuter, de la même façon que dans la première partie, la trivirga de la fin.

TRAIT

LE TEXTE

Seigneur, ne nous traite ni selon les péchés que nous avons commis, ni selon nos iniquités.
Seigneur, ne garde pas souvenir de nos iniquités passées.
Qu’elles se hâtent vers nous, tes miséricordes, car malheureux nous sommes devenus à l’excès.
Aide-nous, Dieu notre salut, et pour la gloire de ton nom, délivre-nous ;
Et sois bien disposé à l’égard de nos péchés à cause de ton nom. Ps. CII, 10, LXXVIII, 8-9.

Ces versets forment à eux trois une supplication qui contient tous les éléments de la prière pénitente : appel à la clémence, à l’oubli, à l’aide.

LA MÉLODIE

Le premier verset se déroule dans le grave autrour de re. L’intonation, très priante dans la progression de plus en plus ardente des pressus, ne s’élève que peu à peu, mais demeure, comme tout le verset d’ailleurs, timide, humble, pénétrée de contrition. Ici encore, l’âme n’ose pas regarder celui qu’elle implore ; son chant ne s’élève que sur les mots où elle s’accuse : peccáta nóstra quæ fécimus nos, iniquitátes nóstras. La dernière syllabe de nóbis qui reprend le très beau motif du début de l’intonation est caractéristique de cette prière en plaintes étouffées.

Le second verset s’établit dès le début sur le fa. Le mot Dómine n’a plus rien de sombre. Il semble que la honte ait disparu ; la supplication prend tout. Elle éclate, ardente, sur memíneris et aux cadences de antiquárum et de túæ.

C’est au début du troisième verset, établi cette fois sur le la, qu’elle atteint son maximum. Dès les premières notes, elle  touche sur adjuva nos les limites extrêmes du mode. Cet appel au secours, qui monte pressant comme un cri de détresse, a quelque chose d’émouvant d’autant qu’à ce moment tout le monde se met à genoux. Les mêmes motifs de prière ardente se retrouvent aux cadences, sur salutáris nóster, sur líbera nos et, avec quelque chose de plus fort encore, sur peccátis nóstris. L’âme peu à peu s’apaise sur la longue finale, et c’est dans une atmosphère de douce confiance que la prière prend fin.

Dans l’intonation, mener le mouvement en progression jusqu’au pressus de Dómine. Ne pas mettre d’emphase dans les teneurs, que tout soit simple et humble. Bien conduire le mouvement vers les pressus de nos et de nóstra, et bien accentuer nóbis. Que le pressus de la fin soit doux.

A tempo sur Dómine, au début du second verset. La distropha et la tristropha de antiquárum, douces.

On peut chanter le dernier verset un peu plus lentement ; surtout le faire pressant.

OFFERTOIRE

LE TEXTE

Je t’exalterai, Seigneur, parce que tu m’as accepté et que tu n’as pas fait se réjouir mes ennemis sur moi.
Seigneur, j’ai crié vers toi et tu m’as guéri. Ps. XXIX, 2-3.

Ces deux versets n’ont rien de pénitentiel. Ils demeurent ce qu’ils furent sur les lèvres du peuple Juif, une louange de reconnaissance.

L’Eglise qui s’offre avec la matière du sacrifice, súscipe sáncte Páter…, prend conscience que Dieu l’accepte et que cette acceptation l’enlève à la domination du démon et la guérit un peu plus des maux qu’il lui a causés. D’où sa joie et l’action de grâces qu’elle fait monter en louange vers le Seigneur et sa miséricorde.

LA MÉLODIE

Elle est toute pénétrée de joie comme il convient à un chant de reconnaissance.

Cette joie, nette et franche dans les intervalles pleins et sonores de l’intonation, se nuance de tendre vénération sur Dómine et va s’épanouir sur suscepísti me en une cadence du Ve mode, paisible et heureuse, non sans avoir souligné fortement sur quóniam l’intérêt capital de ce mot sauveur.

La même insistance se retrouve sur nec delectásti, second objet de la reconnaissance, et la mélodie s’élève dans un très beau mouvement de joie fière et forte qui enveloppe toute la fin de la phrase après s’être épanoui avec éclat sur súper me.

Les deux première phrases ont chanté le motif de la  reconnaissance ; la troisième, elle, est reconnaissance pure : « J’ai crié vers toi, tu m’as guéri. » Le ton est différent, il devient tout intime ; l’âme s’est repliée sur le Seigneur. La mélodie descend sur Dómine gracieuse et pleine de tendre vénération, remonte en un accent de ferveur sur ad te, puis s’étend sur sanásti me en de longs neumes contemplatifs qui ne voudraient pas finir de dire merci.

Faire l’intonation légère et vivante, qu’elle aille vraiment vers le Seigneur. Dómine, doux et très expressif ; les dernières notes retenues. La double note de quóniam est une bivirga allongée : la bien appuyer et y faire passer l’ardeur de la reconnaissance ; la tristropha, légère ; les quatre premières notes qui suivent, un peu retenues. Suscepísti me, bien souple.

Un peu de mordant sur le salicus de nec ; lier les punctums aux tristrophas sur delectásti : la double note de méos est une bivirga allongée. Donner de l’éclat à súper me.

La dernière phrase, légère ; les trois dernières notes de Dómine, élargies ; de même la montée de clamávi ad te dont la double note est une bivirga épisématique.

Ralentir sanásti me jusqu’au premier torculus. La triple note du milieu est une trivirga dont les deux premières notes sont épisématiques. La dernière tristropha, légère.

COMMUNION

LE TEXTE

Qui méditera la loi du Seigneur, jour et nuit, donnera son fruit en son temps. Ps. I, 2-3.

Le sens littéraire est très clair. Le sens liturgique l’est moins. On ne voit pas de prime abord comment cette sentence s’applique au Carême et surtout au moment de la Communion. Cela tient à ce que les communions des féries du Carême, à quelques exceptions près, ont été choisies dans les 26 premiers psaumes à la suite les uns des autres, sans qu’il ait été tenu compte d’autre considération. On peut toutefois l’interpréter dans le sens de cette période de pénitence qui est un temps où la méditation et le lever matinal font partie de l’ascèse ; et même dans le sens de l’Eucharistie en donnant à qui meditábitur in lége Dómini le sens de : qui gardera son esprit sur le Seigneur. La présence divine réalisée de plus en plus est en effet le fruit principal de la Communion : « Celui qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi… et celui qui demeure en moi porte beaucoup de fruit. »

LA MÉLODIE

Bien que le texte ne se prête pas à l’expression de sentiments forts, elle est un beau mouvement de joie. Simple et alerte dans la première phrase ce mouvement eut été parfait si le si bémol n’avait pas malencontreusement pris la place du si naturel sur ac nócte.

Dans la deuxième phrase, la joie est plus intérieure. L’âme, prise par le mot frúctum s’y arrête et contemple, dans l’avenir tout proche, le fruit merveilleux qu’elle va produire au cours de cette période en prêtant concours à la grâce, et qui n’est rien moins que la vie même du Christ intensifiée en elle. L’adaptation de la mélodie est admirable. Après le bel élan de frúctum, elle descend sur la tonique et s’y enroule, sans autre mouvement que d’y revenir sans cesse, comme l’âme à son idée, et d’y prendre fin en une cadence qui porte, en ce qu’elle a d’inachevé, l’accent si particulier de la joie du désir.

Le mouvement doit être vif dans la première phrase. La note qui précède le torculus de Dómini est une virga épisématique, elle a l’ictus ; díe sera lié à Dómine sans aucune pause au quart de barre.

Dans la seconde phrase, à part la première partie du mot frúctum, le mouvement est le même mais légèrement tempéré. Les podatus de témpore auront leur première note bien posée. La finale, très peu ralentie.

Polyphonies pour le carême

Epître, évangile et préface chantés de cette messe, voir ici